Retour

Traitement de soutien dans le cadre de la dépendance à l'alcool

L'intérêt d'un traitement médicamenteux dans la lutte contre la dépendance à l'alcool réside dans sa capacité à agir directement sur les mécanismes cérébraux impliqués. En effet, les médicaments utilisés pour encourager la modération ou l'abstinence fonctionnent en ajustant au niveau cérébral les mécanismes de renforcement qui favorisent la consommation d'alcool. La dépendance est étant envisagée comme un dysfonctionnement des centres de régulation de la récompense du système nerveux central, c'est sur ces circuits que l'on agit, offrant ainsi une nouvelle voie de traitement en ciblant les racines neurologiques de la dépendance.

L'objectif d'un traitement médicamenteux dans le contexte de la dépendance à l'alcool est multiple : il vise à prévenir ou à gérer les symptômes du sevrage, à faciliter la diminution de la consommation d'alcool, à maintenir l'abstinence à long terme, et à traiter les troubles physiques ou psychologiques qui peuvent accompagner la dépendance. 

Pour une gestion efficace de la dépendance à l'alcool, il est essentiel d'opter pour une stratégie médicamenteuse adaptée, élaborée en étroite collaboration avec votre médecin traitant ou tout autre professionnel de la santé informé de votre situation. 

Globalement, on distingue trois catégories de médicaments utilisés dans le cadre du sevrage alcoolique : ceux atténuant les symptômes de sevrage, ceux réduisant l'envie de consommer de l'alcool, et ceux provoquant des réactions physiques désagréables en cas de consommation d'alcool

Prévenir ou traiter les symptômes de sevrage

Des médicaments, tels que le Valium ® (Diazepam) ou le Tranxène® (Clorazépate), peuvent soulager les symptômes de sevrage comme des tremblements et prévenir l’apparition d’une crise d’épilepsie ou d’un délirium tremens. Cette classe de médicaments est parfois prescrite temporairement lorsqu'une personne devient très tendue à l'idée de réduire ou d'arrêter sa consommation d'alcool.

• Ces molécules ne peuvent toutefois être utilisées que quelques semaines, car elles peuvent à leur tour provoquer une possible dépendance.
• Elles peuvent en outre entraîner des effets indésirables, notamment la fatigue, la somnolence, de la torpeur et des difficultés de concentration. Il est vivement recommandé d'éviter toute consommation d'alcool lors de leur prise, car l'alcool peut intensifier de manière significative leur effet sédatif. Un surdosage de benzodiazépines en association avec de l'alcool peut être mortel.
• L'apport en vitamines B-1 et B-6 s'avère également utile. En effet, la carence en vitamine B-1, souvent résultant d'une consommation excessive d'alcool et d'une alimentation négligée, est fortement impliquée dans le développement de troubles neurologiques et de problèmes de mémoire. Ainsi, la supplémentation en vitamine B-1 est justifiée tant dans le processus de sevrage alcoolique que chez les individus qui consomment encore de l'alcool en grande quantité.

Faciliter la réduction ou l'abstinence de la consommation d'alcool

Le Campral® (Acamprosate)

Des médicaments comme le Campral® (Acamprosate) sont conçus pour réduire, bien qu'ils ne suppriment pas totalement, le désir de consommer de l'alcool. L'efficacité de cette réduction se fait sentir habituellement après un délai d'environ trois semaines de traitement. Cette médication est généralement prescrite aux personnes qui ont déjà considérablement réduit leur consommation d'alcool ou qui ont complètement cessé de boire, afin de les aider à éviter de retomber dans leurs anciennes habitudes. Toutefois, elle peut également être suggérée à ceux qui souhaiteraient commencer à diminuer leur consommation ou s'arrêter totalement. En effet, ce médicament est réputé pour offrir une protection au cerveau contre le risque d'apparition soudaine de symptômes de sevrage.

• Bien que l'utilisation de Campral® soit généralement sûre, certains effets secondaires légers et temporaires peuvent se manifester. Parmi ces effets, on compte des nausées, des maux de tête, des étourdissements et de la diarrhée.
• Il est important de noter, cependant, que le Campral® ne produit pas l'effet escompté chez certaines personnes, ce qui souligne l'importance d'une approche personnalisée dans le traitement de la dépendance à l'alcool.

Le Selincro® (Nalmefène)

En avril 2014, le Selincro® (Nalmefène) a été introduit sur le marché, offrant une nouvelle approche pour réduire la consommation d'alcool. Ce médicament agit en diminuant le plaisir associé à la consommation d'alcool, ce qui contribue à réduire l'envie de continuer à boire. Les recherches indiqueraient qu'une baisse de la consommation d'alcool est observée lorsque le Selincro® est utilisé conjointement avec un suivi psychologique. Ainsi, Selincro® représenterait une option intéressante pour les personnes qui se retrouvent à boire plus qu'elles ne le souhaiteraient réellement, en particulier celles qui perdent le contrôle après avoir consommé quelques verres.

• Le Selincro® agit pendant environ 24 heures. Il est préférable de le prendre une à deux heures à l'avance s'il existe un risque que vous buviez de l'alcool. Bien que le Selincro® ne bloque pas l'ivresse, il supprime les sensations plaisantes habituellement ressenties en buvant.
• Les effets secondaires potentiels incluent des étourdissements, des nausées, des maux de tête, de la fatigue, une bouche sèche et de la somnolence, ce qui peut représenter un risque pour la conduite. Ces effets sont généralement temporaires et tendent à disparaître après les deux premières semaines d'utilisation.
• Cependant, il est important de noter que le Selincro® n'est pas une solution miracle pour les addictions sévères à l'alcool. En cas de forte dépendance physique, le désir d'atteindre un état d'ivresse peut surpasser l'effet du médicament. Le Selincro® peut néanmoins aider à rompre plus rapidement le cercle vicieux qui peut s'amorcer après une rechute.
• Le remboursement du Selincro® est possible sous certaines conditions, notamment si la personne bénéficie parallèlement d'un accompagnement professionnel pour son problème d'alcool.

Le Nalorex® (Naltrexone)

Tout comme le Campral®, ce médicament diminue l'envie de boire tout en réduisant le plaisir associé à la consommation d'alcool. Disponible sur le marché belge, il n'est cependant pas pris en charge par l'assurance obligatoire et représente donc un coût non négligeable pour les patients. Ce produit est proche du Selincro® dans son usage, mais il est davantage prescrit pour le traitement de la dépendance aux opiacés.

D'après une méta-analyse récente (2023), la Naltrexone (commercialisée par Viatris) et l’Acamprosate (Campral®) offrent un soutien significatif dans le traitement des troubles liés à l'alcoolo-dépendance.

L'Antabuse® (Disulfirame)

Ce médicament joue un rôle unique dans le traitement de l'alcoolisme en rendant la consommation d'alcool physiquement désagréable. L'Antabuse® agit comme un frein à la consommation d'alcool. Son principe est simple mais efficace : si vous buvez de l'alcool après avoir pris de l'Antabuse®, vous vous sentirez mal. Cette réaction désagréable est un moyen de dissuasion, vous aidant à résister à l'envie de boire. L'idée est de prendre la décision de ne pas boire une fois par jour, au moment de la prise du médicament. Cela peut être particulièrement utile pour briser les habitudes de consommation d'alcool profondément ancrées, surtout au début du processus de sevrage.

• L'utilisation d'Antabuse® offre l'avantage de simplifier la lutte contre l'envie de boire. Cependant, ce médicament n'est pas une solution miracle ni une stratégie à long terme. Il est le plus efficace comme outil de soutien pendant les premières étapes du sevrage.
• Bien que les effets secondaires de l'Antabuse® soient généralement légers et temporaires, ils peuvent inclure des nausées, des maux de tête, des troubles gastro-intestinaux, un goût métallique dans la bouche et une baisse de la libido. Il est important de noter que la réaction à l'alcool peut être sévère, donc ce médicament n'est pas recommandé pour les personnes avec certaines conditions médicales, comme des problèmes cardiaques ou des antécédents de crises d'épilepsie.
• Il est essentiel d'utiliser l'Antabuse® sous la supervision d'un professionnel de santé pour s'assurer qu'il est adapté à votre situation et pour gérer tout effet secondaire potentiel.
• Il est important de mentionner que, depuis mars 2023, le fabricant Sanofi a cessé la production d'Antabuse®, rendant le médicament difficile à trouver dans les pharmacies belges. Cette information souligne l'importance de discuter avec votre médecin des alternatives disponibles et des stratégies de traitement les plus adaptées à votre situation.

En conclusion

Bien qu'il n'existe pas de « pilule magique » pour faire disparaître la dépendance à l'alcool, les médicaments peuvent jouer un rôle significatif dans la modification des habitudes de consommation. Toutefois, il est important de souligner que les traitements médicamenteux sont nettement plus efficaces lorsqu'ils sont combinés avec une prise en charge psycho-sociale adéquate. Cette approche globale est essentielle pour adresser les multiples facettes de la dépendance. En fin de compte, c'est souvent une démarche personnelle et volontaire, appuyée par un accompagnement professionnel, qui permet de surmonter les défis liés à l'alcoolisme et de mener une vie équilibrée et épanouie.

En savoir plus

Retour